Alors que son cavalier formateur venait juste de le rejoindre en Belgique, l’étalon Selle Français Fahrenheit de Vains (Cornet Obolensky x Qredo de Paulstra x Rosire) s’en va et quitte les écuries de Grégory Wathelet qu’il arpentait depuis deux ans pour rejoindre les USA. Entre temps, le joli gris est passé d’un cheval de 7 ans prometteur à un protagoniste de Grand Prix bientôt prêt à rivaliser pour la victoire.
« Lorsque j’ai reçu Fahrenheit, Valentin Pacaud avait fait du bon travail. Il lui manquait juste quelques bases de dressage mais je pense que cela fait partie du système français et c’est aussi une des raisons pour laquelle Valentin avait cette envie de venir chez moi. Je pense qu’il a toutes les qualités pour former d’autres chevaux qui pourront m’aider par la suite. Concernant Fahrenheit, le plan avait toujours été très clair avec ses propriétaires. Dès que je l’ai reçu, j’ai senti un grand potentiel mais qui n’était pas encore prêt à s’exprimer complètement. Il n’était alors pas question de le commercialiser directement. Je voulais qu’il puisse montrer pleinement son talent. Cette année, il m’a accompagné sur de nombreux concours 5*. J’ai vraiment senti un déclic. Il a participé à ses premiers Grand Prix 5* et il était très proche du sans-faute. C’est un cheval respectueux et sensible avec lequel il fallait prendre le temps. Mais aujourd’hui, c’est un cheval facile à monter qui a une véritable envie de bien faire. C’est certain que pour moi, sportivement, il faisait clairement partie des plans de l’écurie. Mais la commercialisation était le plan que nous avions convenu avec son propriétaire dès le départ. Comme je l’ai toujours fait dans ma carrière, il était très important de respecter cet engagement. Par expérience, je sais aussi que souvent un autre cheval va faire sa place et saisir l’opportunité qui se présente. » réagi Grégory Wathelet.
Pour l’élevage de Vains, cette vente est une belle réussite mais est également emprunte d’une grande émotion pour un cheval qui a marqué l’histoire de l’élevage.
« Lorsque Fahrenheit est né, il a tout de suite eu une prestance exceptionnelle. A peine une heure après sa naissance, il se tenait droit tel un seigneur. En fait, mon père avait acheté, par téléphone, à Jean-François Noel, Ismène du Thot, alors pouliche . Elle a fait une brillante carrière avec Laurent Goffinet et Kevin Staut avant de permettre à l’un de mes frères de faire de belles épreuves. C’était une jument avec du caractère et énormément de sang. Un jour en rentrant de Lanaken, mon père me dit qu’il a vu beaucoup de produits de Cornet Obolensky et trouvait que c’était vraiment fantastique. Il regarde la production et téléphone à l’élevage de Riverland car il avait vu qu’ils avaient eu une pouliche … mais elle était déjà vendue, c’était Arquana de Riverland! Du coup, nous avons acheté des paillettes … et l’année suivante, Ismène était pleine avec une seule paillette! On pouvait juste craindre pour son caractère car les deux parents n’en manquaient pas … mais on a eu un cheval doux comme un agneau. Il était calme et placide … et on a vu par la suite qu’il savait se donner en piste. A deux ans, notre cavalier en a eu marre de le voir sous la pluie … et on l’a rentré. Du coup, mon père s’est dit qu’on allait le présenter au concours de deux ans alors qu’on n’avait jamais fait cela. Nous sommes arrivés au régional de Saint Lô, Fahrenheit est à peine entré en piste, il n’avait pas encore sauté une barre que nous avions trois clients pour le cheval dont le Holstein Verband. Fahrenheit a fait une démonstration en remportant la « qualif ». Lors du national, il était un peu plus blasé et n’a sorti qu’un bon saut sur l’ultime gros oxer comme s’il jugeait que le reste était trop petit pour lui.
Mon père n’était pas très chaud pour le distribuer à 3 ans mais j’ai beaucoup insisté car c’était le seul fils de Cornet approuvé en France et en plus avec une très bonne jument qui avait tourné sur 1m50. Nous l’avons donc proposé en dernière minute à France Etalons qui a ajouté une page à son catalogue pour lui au tout dernier moment. Il a été stationné à Saint Lô durant la saison de monte. Il y a eu une véritable effervescence autour de lui au salon et finalement, il a sailli 53 juments. Nous avions déjà eu plusieurs étalons … mais aucun n’avait rencontré un tel engouement autour de lui. Fahrenheit était vraiment un cheval à part. D’ailleurs, je dois bien avouer que je l’ai monté une fois moi-même. Je venais de terminer mes études et je n’avais plus monté depuis très longtemps. Fahrenheit avait quatre ans. Je l’ai trouvé tellement exceptionnel que je ne suis plus jamais monté dessus car il était clairement trop bon pour moi! C’était un cheval assez tardif, il était très grand. L’enthousiasme des éleveurs mettait une pression supplémentaire qui est, en fait, assez inutile car les étalons restent de jeunes chevaux comme les autres qui ont aussi besoin d’apprendre. A 5 ans, nous l’avons fait admettre à Zangersheide. Et puis il a remporté le master d’étalon de Saint Lô dans la foulée … ensuite le covid est arrivé. Nous n’avions pas prévu de le distribuer mais nous avons reçu tellement de messages que finalement, nous l’avons proposé en frais durant la pandémie. Il a ensuite fait quelques concours par la suite puis nous avons décidé de le mettre en vacances à la plage avant le CIR. A 6 ans, il fait 4 et 0 à Fontainebleau où il manque la finale avant de faire une belle année de 7 ans toujours avec Valentin Pacaud qui le montait depuis ses 5 ans. Grégory Wathelet est ensuite venu l’essayer lors du CSI5* de Dinard … et il est reparti avec lui. Pour nous, depuis notre collaboration pour Rio de Vains, nous étions persuadés que nous lui confierions d’autres chevaux car au-delà du très bon cavalier qu’il est, Grégory est un homme de valeur qui est également très drôle en plus d’être carré. On savait qu’à un moment il faudrait vendre Fahrenheit même si je dois bien admettre que nous nous sommes pris au jeu de l’étalonnage et que nous avons pris beaucoup de plaisir à le voir évoluer en 5*. C’est une décision d’autant plus difficile que nous n’avons pas d’autre cheval actuellement pour prendre la relève. Nous sommes des passionnés. Ce qui nous anime, c’est de faire naître des chevaux avec notre affixe. Mais il faut savoir être réaliste car l’élevage n’a pas toujours une grande rentabilité. Fahrenheit est une magnifique réussite. C’est un plaisir d’avoir fait naître un tel cheval et de l’avoir emmené jusque là. Mais c’est aussi la réussite de Grégory qui a beaucoup de mérites : celui de l’avoir beaucoup travaillé, beaucoup sur le plat au début pour finalement l’avoir emmené jusque là et de nous avoir guidé jusqu’à sa commercialisation. C’est un plaisir de travailler avec quelqu’un qui vous envoie des vidéos et vous explique pas à pas l’évolution de votre cheval. Fahrenheit a vraiment une personnalité à part et nous continuerons sans aucun doute de le suivre dans le futur. » nous explique Jean Baptiste Bihl de l’élevage de Vains.