Au début du mois de juin, le cadre majestueux du château de Bertichères a été le théâtre d’un exploit rare dans le monde du concours complet. Le type d’exploit qui mérite qu’on revienne dessus: Samantha Lissington a signé un triplé inédit. Ce week-end-là, la Néo-Zélandaise de 34 ans n’a pas juste gagné le Royal Jump, CCI 4*-L de Chaumont en Vexin : elle a raflé le podium entier, avec la nonchalance d’une cavalière qui avait visiblement décidé de tout prendre. Absolument tout.
À la sortie du rectangle de dressage, ils étaient peu à miser sur un triplé. Troisième, septième et douzième : voilà où se situait Samantha Lissington après la première manche. Pas de quoi faire trembler les tribunes ni allumer Twitter. Et pourtant.
Parce qu’en complet, le vrai terrain de jeu, c’est le cross. Et c’est là que la Néo-Zélandaise a sorti le grand jeu. Trois chevaux, trois cartouches, et surtout trois parcours sans une bavure. La trajectoire de Quantar S ? Un métronome. Fluide, engagé, sans un regard pour les options B. La cavalière enchaîne les obstacles comme si elle les connaissait depuis dix ans. Pas de frayeurs, pas d’hésitation, juste une cavalière qui connaît ses chevaux, qui lit le terrain comme un roman de poche et qui place chaque foulée comme on placerait un pion sur l’échiquier.
La Néo-Zélandaise ne vient pas pour faire tapisserie. Elle construit, elle gère, elle assène. Avec style.
Dimanche, pendant que certains faisaient tomber des barres comme des dominos, elle elle remet ça en enchaînant les sans-faute comme si de rien n’était. Sur un parcours technique — seulement quatre sans-faute sur douze — Lissington a signé deux parcours parfaits et une seule faute sur ses trois chevaux. Résultat ? Quantas R (By Qualito x Galaxy R By Grey Top) en or malgré une barre (31,3), Billy Alberto en argent avec un sans-faute clinique (35,8), et Delarado, aussi précis qu’un coucou suisse, pour compléter le podium (36,7). Trois chevaux, trois masterclasses, un seul nom sur toutes les lèvres.
Et pendant que la concurrence comptait les points et les regrets, Samantha savourait, sourire XXL, entourée de ses montures :
« Je n’avais pas prévu ça, c’est au-dessus de tout ce que j’espérais. Mes chevaux ont été géniaux. » Elle aurait pu ajouter : « et moi aussi », mais visiblement, l’humilité fait aussi partie de ses qualités.
Derrière, la suite de ce classement digne de championnats nationaux organisés dans le Queen Elisabeth Park de Paekakariki (si vous cherchez, c’est à droite tout tout en bas sur la carte), en tout cas pour son quinté, puisque 100% kiwi… Tim Price (4e) et Jesse Campbell (5e) ont tenté de limiter les dégâts, pendant que les Français jouaient à domicile…sans vraiment se sentir chez eux. Benjamin Massie, premier tricolore, terminait sixième avec 46,2 points, juste devant Sébastien At. Mention spéciale à son Casanova du Frety, auteur d’un sans-faute à l’obstacle, rare denrée ce jour-là.
Mais soyons honnêtes : ce week-end là, il n’y avait qu’une patronne, et elle avait trois chevaux. Bertichères a vu passer une tornade noire venue du Pacifique, et elle s’appelait Samantha.