Un parking transformé en camping, des douches pour chevaux, une piscine gonflable et des voltigeurs qui volent. Bienvenue à Flémalle, où la voltige a fait son entrée par la grande porte.

Jusqu’ici, en Wallonie, la voltige, c’était un peu comme le curling en été : personne n’en parlait, sauf peut-être un cousin éloigné qui en avait fait “quand il était petit”. Et puis il y a eu ce week-end de juin, où au Jump’in Flémalle, un centre équestre plutôt taillé pour le dressage et le saut, on a monté les lices, installé les tables de juges et mis les petits plats dans les grands pour accueillir le tout premier CVI (Concours de Voltige International) organisé sur sol wallon. Un CVI 1*, 2* et 3*, autrement dit, des débutants motivés jusqu’aux voltigeurs qui visent les étoiles.

La genèse de ce premier rendez-vous de haut vol ? “Au départ, on voulait organiser un concours international, mais pas tout de suite du jumping ou du dressage. Trop lourd en logistique. Alors on s’est dit : essayons la voltige”, raconte Aline Hubot, la co-organisatrice avec Marine Wery également co-propriétaires de Jump’in.
60 voltigeurs, 33 chevaux, 1 piscine, et une première réussie.
Aline Hubot et son équipe, pourtant rodée à l’organisation d’événements hivernaux, avoue avoir tout appris “sur le tas”. “On ne connaissait rien à la voltige. On a découvert que les bâches, c’était capital dans la piste. Qu’il fallait dix bénévoles rien que pour les juges. Et que les voltigeurs adorent camper.” Résultat ? Un joyeux micmac au début. « On avait monté deux pistes alors qu’une seule était nécessaire » Mais tout est très vitre rentré dans l’ordre et tout s’est mis en place grâce, notamment, à une vingtaine de bénévoles et pas mal de flexibilité. “C’est un autre univers, mais les gens sont adorables. Ils ont même monté une piscine sur le parking.” Il faut dire que la chaleur était aussi au rendez-vous. Mais sur ce point là aussi les installations ventilées à l’intérieur ont permis le bon déroulement des épreuves.

Mais attention, pour ces épreuves, on ne parle pas ici de simples enfants qui grimpent sur des poneys. Non. On parle d’une discipline à la croisée de la gymnastique, de la danse contemporaine et du cirque équestre. Et d’un niveau qui impressionne, même les pros. “Le trois étoiles, c’est le niveau des championnats du monde. Donc oui, ici, à Flémalle, le niveau est très bon”, lâche Rob de Bruin, juge néerlandais 4*, une des références internationales du circuit.



Le petit pas cadencé très spécifique pour se présenter au bord du cercle, autre acteur essentiel, le longeur lance le galop du cheval, la voltigeuse (eh oui la gente masculine n’est pas majoritaire dans la discipline) lève le bras pour demander de lancer la musique et c’est parti pour un passage qui ne va pas dépasser la minute trente. Imposé ou libre, le programme se déroule. Le mot voltige prend alors tout son sens. De la montée sur le cheval jusqu’à la sortie, les cabrioles s’enchainent. Même si on n’est pas un spécialiste, l’admiration s’impose tant la symbiose entre les acteurs est nécessaire.


Comment ça se juge, la voltige ?
“Il y a quatre tables de notation”, explique Rob. “Les juges A regardent le cheval : son galop, son confort, son attitude. Les B jugent la technique. Les C l’artistique. Est-ce que le voltigeur danse, est-ce que c’est expressif ? Est-ce que c’est vivant ?” Autrement dit, vous pouvez avoir des abdos en béton, si vous ressemblez à un robot sur votre cheval, c’est non.


Et pour ceux qui s’inquiètent d’un jugement à la patinage artistique façon “on ne sait jamais trop comment c’est noté”, Rob rassure. “Oui, c’est subjectif. Mais on essaye d’être le plus juste possible. Une chute, c’est très pénalisant. Mais l’erreur fait partie du sport.” Pas encore remplacé par l’intelligence artificielle, Rob admet pourtant que “dans le futur, des applis pourraient aider sur le plan technique”. En attendant, c’est encore lui et ses « collègues » qui décident si ce salto arrière méritait un 8 ou un 9.

Louise, voltigeuse de demain et régionale de l’étape.
Parmi les voltigeurs présents, une étoile montante : Louise Meskens, jeune cavalière de la région namuroise. “C’est la première fois qu’un concours se déroule en Wallonie, c’est cool”, dit-elle en souriant, un peu surprise d’avoir une journaliste en face d’elle, même si ça n’enlève rien à son naturel et à sa décontraction. Même si elle est au tout début de sa « carrière » de voltigeuse, elle a déjà posé ses mains sur les dos ronds de chevaux en France, aux Pays -Bas ou en Italie en catégorie Children I et 2.. Et à Flémalle, elle voit aussi haut que les figures dynamiques de ses aînés. “C’est l’occasion de rencontrer d’autres voltigeurs, de s’inspirer. En Italie, j’ai pu rencontrer la championne du monde et ici aussi c’est intéressant de regarder les autres qui sont expérimentés. En plus c’est à côté de la maison, donc c’est vraiment bien.”

Le rêve est là, palpable, transpirant sur les surfaits et à travers les figures à une main. À Flémalle, on se fait des copains, on apprend à danser sur un galop, et surtout, on montre que la Wallonie existe désormais sur la carte de la voltige internationale.

Et la suite ?
Est-ce que cette première édition a attiré les foules ? Pas encore. “On s’attendait à plus de monde”, reconnaît Aline Hubot. “Mais c’est normal, c’est une première. On doit faire nos preuves. L’infrastructure est bonne, les chevaux ont des douches, des boxes en dur. Et l’ambiance est géniale. Les participants, Scandinaves, Bataves ou encore originaires d’Allemagne , eux, veulent déjà revenir. « Je pense que maintenant qu’ils on vu ce qu’on savait faire, le bouche à oreille va faire son travail pour une prochaine édition » confie Aline Hubot. Il y a par ailleurs déjà eu une demande pour l’organisation des championnats de belgique dès le mois de septembre. Et si Flémalle s’était découvert une passion pour la voltige?

En attendant, la Wallonie peut se féliciter d’avoir mis un pied — ou plutôt une main tendue — dans le grand monde de la voltige. Comme quoi, il suffit parfois de grimper sur un cheval au galop pour voir les choses sous un autre angle.




