Marcus Ehning, Aix’ceptionnel

Publié par Julien Counet le 03/07/2023

Un Grand Prix historique, un stade de 45.00 personnes comble, 1.500.000 euros de dotation, le Grand Prix d’Aix-la-Chapelle est incomparable.  Faire partie des quarante cavaliers à prendre le départ est un honneur.

La grandeur de ce Grand Prix s’est construite année après année avec ses tragédies et ses exploits, des rires, des larmes et des déceptions. 2023 n’y aura pas échappé.

A l’image d’Olivier Perreau, premier à s’élancer qui crée la surprise en signant d’emblée le premier sans-faute. Malheureusement pour le protégé de GL Events, la seconde manche sera cruelle en s’achevant devant le mythique double de bidets que Dorai d’Aiguilly (Kannan x Toulon), sœur utérine d’Eldorado vh Zeshoek, ne franchira pas.

L’énorme déception pour McLain Ward avec son incroyable HH Azur (Thunder vd Zuuthoeve) : vainqueur du Grand Prix de Genève, vainqueur du Grand Prix de ‘s Hertogenbosh qui pouvait remporter sa troisième étape consécutive du Rolex Grand Slam et le bonus qui allait avec! Malheureusement, cette semaine, Azur n’était pas au sommet de son art. L’américain le comprend vite et lève la main.

Après la première manche, ils sont encore douze à rêver de pouvoir s’imposer. Néanmoins, si Steve Guerdat a vaincu le signe indien qui l’avait jusqu’à présent empêché de remporter les épreuves majeures d’Aix la Chapelle en s’imposant jeudi soir dans la Coupe des nations, le Grand Prix ne sera pas encore pour cette année. Dynamix de Belheme (Snaike de Blondel) réalise deux tours splendides … sauf qu’elle était bien décidée à ne pas passer ce nouveau mur qui était présenté aux chevaux sous son autre face par rapport à la Coupe des nations. Il faudra toute la détermination et l’habilité du Suisse pour y parvenir mais le mur tombera malgré tout.

Vainqueur l’an dernier, Gerrit Nieberg signe un nouveau sans faute en première manche mais cette fois, le rêve s’arrête lors de la seconde manche avec une faute de Ben 431 (Sylvain).

La déception sera également là pour Nicola Philippaerts. Une énorme déception pour le vainqueur du Grand Prix de La Baule qui avait toutes les cartes en main pour frapper encore un grand coup … mais qui se verra privé de barrage avec Katanga vh Dingeshof (Cardento x Tornedo FC) pour … 8 centièmes de seconde! Tragique!

Du coup, ils ne seront plus que cinq à rêver d’une victoire avant cette ultime étape : le barrage !

Le premier à s’élancer est la grande surprise du jour : le Mexicain Eugenio Garcia Perez et son impressionnant hongre de 12 ans, Contago (Cornet Obolensky x Cassini II). Le couple tente de mettre la pression sur ses poursuivants mais cette fois, ça ne passe pas : 4 points !

C’est sans aucun doute le retour de l’année. Celui que beaucoup ont espéré : Rodrigo Pessoa est bel et bien de retour au tout premier plan. Depuis son retour en Europe, le couple a réalisé le double sans-faute dans la coupe des nations de St Gall (2ème place), le double sans-faute dans la Coupe des nations de La Baule (victoire), double sans-faute dans le Grand Prix de La Baule (5ème place) … et il est de nouveau présent dans ce Grand Prix qui tient tellement à cœur au Brésilien. Malheureusement, une faute lors du barrage met fin à leur rêve de victoire mais laisse malgré tout une énorme note positive et la renaissance d’une véritable légende.

La famille Weishaupt aura vécu un incroyable dimanche avec les deux frères au départ du Grand Prix. Pour sa première participation, le cadet Maximilian s’en sortira avec trois fautes sur DSP Omerta Incipit (Levisonn). L’ainé lui a tenté de décrocher une seconde victoire avec son tout jeune 9 ans, Zineday (Zinedine). Malheureusement eux aussi fautent mais du coup, le cavalier des écuries Beerbaum accélère encore un peu plus pour sauver ce qu’il y a à sauver. Il améliore le temps de Rodrigo Pessoa de plus de trois secondes … et s’installe en tête. La victoire sera allemande … et il n’y aura pas de nouveau vainqueur au terme de ce Grand Prix.

Vainqueur en 2021, Daniel Deusser n’est pas loin de remporter la mise pour la seconde fois en trois ans. Killer Queen VDM (Eldorado vh Zeshoek x For Pleasure) touche mais rien ne tombe : 45’’73, premier temps de référence!

Mais il reste un homme ou plutôt un véritable centaure : Marcus Ehning! Il gère à la perfection son barrage avec l’étalon du Gestuet Sprehe, Stargold (Stakkato Gold x Lord Weingard) pour boucler un troisième tour sans pénalité en 45’’12. Après 2006 sur Nolte’s Kuchengirl, après 2018 avec Prêt à Tout, Marcus Ehning ajoute une troisième victoire du Grand Prix d’Aix la Chapelle à son palmarès. La classe à l’état pur.

Ce week-end, Julien Epaillard a lui aussi remporté un Grand Prix doté d’un million et demi d’euros à Monaco mais sans enlever de mérite au Normand, grand gagneur devant l’éternel la comparaison s’arrête là … l’histoire avec un grand H continue à s’écrire dans la Soers. Les sports équestres ont la chance de pouvoir compter chaque semaine sur de nombreux organisateurs motivés pour bien faire les choses et nous offrir un sport merveilleux mais la légende ne s’achète pas, elle s’écrit…

« Il n’y a rien de plus beau que de gagner ici. Cette année, j’ai dû renoncer à la finale de la Coupe du monde car la semaine avant son départ, Stargold s’est donné un coup dans son box. Ce n’était pas grave, il a continué à être monté tous les jours mais cela a mis plus de temps que nous le pensions pour qu’il récupère. Finalement, cela lui aura fait faire un break de trois mois qui lui aura fait beaucoup de bien. Je l’ai recommencé à Balve début juin où il m’a tout de suite montré qu’il était bien en étant sans faute les deux jours dans des épreuves 140 alors je l’ai emmené à Stockholm où il prend la 4ème place le deuxième jour avant d’être troisième du Grand Prix sans toucher une barre … puis nous sommes venus ici. Depuis quelques années, j’ai décidé de ne plus prévoir de concours la semaine après Aix car on ne sait jamais ce qu’il va s’y passer. L’année dernière, j’ai connu un assez mauvais concours … mais cette année, je compte bien profiter de cette semaine de congé pour fêter correctement cette victoire. Je compte bien la savourer comme il se doit. Ensuite, nous verrons les opportunités qui s’offrent à nous mais si je suis sélectionné, je participerais au championnat d’Europe cette année. Les Jeux olympiques sont évidemment un objectif mais d’ici l’an prochain, nous verrons … peut-être que je ne monterai plus … » répond avec un grand sourire lui qui aura laissé exploser sa joie comme on l’a rarement vu.

Daniel Deusser sait profiter de l’instant présent sans se prendre la tête : « Evidemment que j’aurais préféré gagner. J’aurais certainement pu aller plus vite … mais il faut être réaliste, si j’avais enlevé une foulée quelque part, Marcus en aurait fait de même alors je n’ai vraiment pas de regret. Je suis très heureux de la manière dont ma jument a sauté, c’est le principal pour moi. »

Philipp Weishaupt était quant à lui très fier de sa performance : « Il y a évidemment plein de choses que j’aimerais changer mais je suis avant tout très fier de mon cheval. Devant moi, ce sont deux pilotes fantastiques avec des chevaux de championnats qui sont expérimentés. Mon cheval n’a que 9 ans, c’était le cheval le plus jeune de l’épreuve et il a montré à quel point il était incroyable. Terminer sur le podium d’un tel Grand Prix à cet âge, c’est juste incroyable. Je suis vraiment ravi. Je tiens aussi à remercier Ludger Beerbaum qui vient de faire ses adieux à la compétition. Cela fait dix ans qu’il en parle, mais c’est difficile de prendre une telle décision lorsqu’on est toujours compétitif. C’est beaucoup d’émotions pour moi et pour toute l’écurie. C’est une grande page du sport qui se tourne mais aussi le succès de grandes relations car Madeleine Winter Shulze l’aura accompagné dans les bons comme dans les mauvais moments, tout comme sa groom qui a fait toute sa carrière avec lui. Ils auront vécu toute leur vie ensemble finalement. » conclut Philipp Weishaupt.